jeudi, mars 29, 2007

L’arsource

Par Jacques Rancourt
Au pays des souvenirs
Mes autres poèmes

L’arsource

Cette mare d’eau ainsi prénommée
Cette arsource n’était qu’un petit trou d’eau
Cette source n’était pas une vraie source
C’était une flaque que la pluie remplissait
C’était là que les vaches allaient se désaltérer
C’était là que le paternel puisait son eau l’hiver
Son puits près de l’étable faisait faux bond l’hiver
L’arsource venait miraculeusement à son secours

Pour mes yeux d’enfants et son imaginaire
Cette arsource était un véritable lac
C’était le Léman, le Lac Majeur, le Lac Supérieur
C’est de là que provenaient d’étranges sons au printemps
On aurait dit une fanfare, un carillon de bruits disparates
On tendait l’oreille, on sentait comme un étrange appel
C’étaient les grenouilles qui sortaient de leur torpeur hivernale
C’étaient les grenouilles et les crapauds qui appelaient le printemps

Je passais des heures à écouter et à rêvasser
Je sentais monter en moi une sève printanière
Il faut dire que les érables donnaient leur belle eau
Il faut dire que les vaches donnaient de jeunes veaux
Il faut dire que ce réveil de la nature provoquait l’euphorie
De longs mois d’hiver à grelotter et à jeûner
De longs mois d’hiver à vivre dans l’hibernation
Ce chant des crapauds et des grenouilles
Quelle délivrance saisonnière
Quel appel à la liberté

Cette arsource, nostalgie d’une enfance insouciante
Cette arsource vivra toujours dans mes souvenirs adultes


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Photo prise dans le rang Sainte-Évelyne par Jacques Rancourt

3 commentaires:

Anonyme a dit...

Tu as une photo inédite du plan d'eau de mon coin natal....Quels souvenirs lointemps fais-tu monter en surface!

Pour cette chose aussi banale, tu as le tour de faire vivre des moments qui dépassent la poésie, même en y déformant le nom de ce trou d'eau...Peut-être que Lucifer y est pour quelque chose, puisque "L'arsource" fait suite à ton écrit concernant la diabolique tentation....

J'ai beaucoup de plaisir a lire tes textes parfois déroutants, mais d'une grande profondeur.

Anonyme a dit...

Merci Jacques pour réveiller dans nos mémoires de si vieux et lointains souvenirs d'enfance!
Cette "arsource" près de l'étable et du poulailler était un lieu privilégié pour nous, car en hiver, elle devenait notre patinoire et, pour les autres saisons, un lieu propice aux multiples jeux, parfois dangereux. Je me rappelle que Michel et moi, avions essayé de la traverser avec un bateau de fortune, une vieille auge à cochons transformée en chaloupe, et nous avions chaviré à un ou deux mètres du bord. Tout trempés, nous avions essuyé toute une réprimande de notre mère qui nous voyait déjà noyés! (rires)
Il existait aussi deux autres "arsources" sur chacune de nos deux terres, l'une à l'orée du bois (celle d'en haut) et l'autre en plein pacage (celle d'en bas). Dieu que l'on a pu jouer autour de ces "arsources"!

Anonyme a dit...

Poème magnifique car il nous ramène à nos sources profondes...
Mon vieux prof en psychologie à l'université nous disait toujours que chez tout individu, tout se passe et se détermine dans nos 5 ou 6 premières années!
Bien sûr, qu'à l'époque, on ne le prenait pas trop au sérieux...mais 60 ans plus tard, à force d'observer mes enfants et petits-enfants, je crois que mon vieux prof n'avait pas tout à fait...tort!